La fin de la dispense d’organisation des élections du CSE en l’absence de candidats dans les entreprises de 11 à 20 salariés
Dans le cadre des ordonnances dites Macron du 22 septembre 2017, créant le Comité Social et Economique (CSE), une procédure spécifique a été prévue pour l’élection des représentants du personnel dans les entreprises dont l’effectif est compris entre 11 et 20 salariés.
À cet égard, l’article L. 2314-5 alinéa 5 du Code du travail dispose :
« Par dérogation aux premier et deuxième alinéas, dans les entreprises dont l’effectif est compris entre onze et vingt salariés, l’employeur invite les organisations syndicales mentionnées aux mêmes alinéas à la négociation du protocole d’accord préélectorale à la condition qu’au moins un salarié se soit porté candidat aux élections dans un délai de trente jours à compter de l’information prévue à l’article L. 2314-4. »
REMARQUE
L’information visée à l’article L. 2314-4 du Code du travail correspond à l’information par l’employeur, par tout moyen de la tenue des élections professionnelles.
Le 8 août 2023, l’interprétation de cet alinéa par le Ministère du Travail a changé, mettant un terme à la possibilité pour ces entreprises de ne plus organiser leurs élections du CSE en l’absence de candidats.
Nous revenons ci-après sur la position antérieure de l’Administration et sur son évolution. Nous verrons en dernier lieu ses implications pratiques.
Avant le 8 août 2023 : une possibilité pour les entreprises de 11 à 20 salariés de ne pas organiser leurs élections du CSE en l’absence de candidats
Deux interprétations du texte s’opposaient avant cette date, à savoir d’une part l’interprétation restrictive du Conseil constitutionnel, et d’autre part l’interprétation extensive du Ministère du Travail.
L’interprétation restrictive du Conseil constitutionnel
Le Conseil constitutionnel avait été saisi pour se positionner sur la constitutionnalité de certaines dispositions des ordonnances Macron parmi lesquelles celle portant sur la procédure spécifique aux entreprises de 11 à 20 salariés.
Dans ce cadre, tout en validant les dispositions légales, le Conseil constitutionnel adoptait une interprétation restrictive du texte et considérait que les entreprises de 11 à 20 salariés étaient certes dispensées d’inviter les organisations syndicales à négocier le protocole d’accord préélectoral (PAP), mais ne concluait pas à la dispense d’organisation des élections professionnelles, même en l’absence de candidat à l’expiration du délai de 30 jours précité.
Dans sa décision, le Conseil indiquait effectivement que :
« En adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu éviter que, dans les plus petites entreprises, l’employeur soit tenu d’entamer la négociation d’un protocole préélectoral qui, en l’absence de candidature d’un salarié déclarée dans les trente jours de l’annonce de l’élection, pourrait s’avérer sans objet. » (Cons. const. 21 mars 2018, n° 2018-761 DC).
Il y a lieu de noter que la position du Conseil constitutionnel était parfaitement conforme à la lettre du texte, lequel ne prévoit en aucun cas la fin du processus électoral en l’absence de candidature, mais bien une dispense de négociation du PAP.
L’interprétation extensive du Ministère du Travail
L’Administration avant le 8 août 2023 adoptait quant à elle une interprétation plus large du même texte et estimait que :
« Dans les entreprises dont l’effectif est compris entre 11 et 20 salariés, lorsqu’aucun salarié ne s’est porté candidat aux élections dans les 30 jours suivant la diffusion de l’information par l’employeur au personnel de l’organisation prochaine des élections, ce dernier est dispensé d’inviter les organisations syndicales à négocier le protocole d’accord préélectoral. Le processus électoral s’achève, les élections professionnelles n’ont pas à être organisées (art. L. 2314-5). L’employeur établit à cette date un procès-verbal de carence » (Question-Réponses du Ministère du Travail du 18 déc. 2019, n°44).
Aussi, l’ancien Cerfa n° 15248*04 « Procès-verbal de carence pour tous les collèges du CSE » indiquait dans l’encart réservé aux entreprises de 11 à 20 salariés : « conformément aux dispositions de l’article L. 2314-5 alinéa 5, aucune élection n’a été organisée » :
Après le 8 août 2023 : fin de la dispense d’organisation des élections du CSE même en l’absence de candidats pour les entreprises de 11 à 20 salariés
Le Ministère du Travail a récemment changé radicalement de position pour adopter une interprétation désormais en conformité avec la lettre de l’article L. 2314-5 du Code du travail et avec la lecture du texte du Conseil constitutionnel.
C’est par mise à jour du Cerfa, le 8 août dernier, que le Ministère du Travail a fait connaître sa position. Ci-après l’extrait du Cerfa n° 15248*05 « Procès-verbal de carence pour tous les collèges du CSE » s’agissant des entreprises de 11 à 20 salariés :
Désormais, au regard de la position commune du Ministère du Travail et du Conseil constitutionnel, l’employeur ne peut plus échapper à l’organisation des élections professionnelles, même en l’absence de candidature dans le délai de 30 jours suivant l’information de la tenue des élections.
Ce changement de position bien qu’inattendu est bienvenu, sécurisant ainsi le processus des élections des petites entreprises. En effet, jusqu’alors, elles s’exposaient à un risque de contestation, certes limité compte tenu de la position du Ministère du Travail, mais non nul.
Quelles sont les implications pratiques de l’évolution de la position du Ministère du Travail ?
En pratique, en l’absence de candidat à l’issue du délai de 30 jours, la procédure à suivre est la suivante :
- Adopter une décision unilatérale de l’employeur (DUE) sur les modalités organisationnelles des élections professionnelles. En effet, conformément à l’article L. 2314-5 al. 5 du Code du travail précité, l’employeur est dispensé d’inviter les organisations syndicales à négocier le PAP lorsqu’aucun candidat ne s’est présenté à l’issue du délai de 30 jours à compter de l’information de l’organisation des élections.
- Inviter les organisations syndicales à déposer des candidatures. En effet, la dispense ne concerne que l’invitation à négocier le PAP mais non celle consistant à inviter les organisations syndicales intéressées à établir leurs listes.
À NOTER
Les organisations syndicales concernées sont celles qui sont habituellement invitées à négocier le PAP et à déposer leurs listes de candidats conformément à l’article L. 2314-5 alinéas 1 et 2.
Pour en savoir plus, n’hésitez pas à consulter notre article de blog sur les règles juridiques encadrant le dépôt d’une candidature aux élections du CSE. - Organiser classiquement les deux tours du scrutin.
- Le cas échéant, remplir et déposer / télétransmettre le procès-verbal de carence actualisé.
REMARQUE
Certaines questions subsistent quant à l’application de cette évolution, notamment en raison de la mise à jour attendue du Questions-Réponses du Ministère du Travail sur le CSE, dont la date n’est actuellement pas connue. Nous pouvons par exemple nous interroger quant à l’application dans le temps de ce changement.
Enfin, il convient de remarquer que, pour des entreprises de 11 à 20 salariés, il sera parfois plus opportun d’appliquer la procédure « classique » des élections professionnelles, c’est-à-dire celle prévue pour les entreprises de plus de 20 salariés.
En effet, dans certaines hypothèses, l’employeur pourrait préférer – puisque cette procédure propre aux entreprises de 11 à 20 salariés ne lui permet plus de se dispenser potentiellement de l’organisation des élections – inviter directement les organisations syndicales à négocier le PAP, sans attendre l’expiration du délai de 30 jours et sans s’encombrer de formalités supplémentaires. Tel peut être le cas notamment :
- Dans l’hypothèse où l’employeur souhaiterait mettre en place ou renouveler son CSE rapidement, par exemple en raison de l’expiration à venir des précédents mandats ;
- Dans l’hypothèse où des candidats auraient déjà fait connaitre à l’employeur leur volonté de se présenter aux élections du CSE.
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